Articles de Mantelia

Le Livre des Morts de Ptah – Prologue

   Je vous propose un voyage dans l’Au-Delà très étoffé des anciens égyptiens. Voici donc un prologue pour nous mettre bien en jambe et commencer sur de bonnes bases. – Amanda

   Je suis mort. Mon enveloppe corporelle s’est éteinte. Plus rien ne fonctionnait correctement vers la fin. Ma vue d’aigle avait fini par baisser jusqu’à ce que je ne puisse plus distinguer les caractères que traçait ma main tremblante. Je n’étais plus bon à rien, imaginez un scribe royal incapable de tracer un cartouche correctement. Impensable. Même le hiératique et le démotique m’étaient inaccessibles. Je n’étais plus en fonction depuis des années, mon fils avait pris la relève, mais avoir perdu mon seul talent me peinait au-delà de tout ce que j’aurais pu imaginer.

   Préparer mon départ de la vie terrestre était la seule activité qui m’empêchait de devenir totalement aigri. J’avais hâte, tellement hâte, de quitter toutes ces considérations futiles. Commencer un nouveau voyage. J’en rêvais. J’avais déjà quitté le monde des vivants.

   Et puis, je suis mort. Ce fut très calme. Je me suis endormi, au matin, je ne pouvais plus bouger un seul muscle.

   Mon souffle est désormais figé dans ma poitrine, mon cœur ne bat plus, mes paupières fatiguées refusent de se soulever. Je me sens bien, léger. Puis soudain, je réalise que je suis prisonnier de mon corps mort. Mon soulagement n’a été que de courte durée. Et si jamais je restais enfermé comme ça durant l’éternité ? J’ai peur. Rien ne se passe. Le temps des hommes s’est arrêté pour moi. Je panique, mais tout semble lointain.

   Je suis en train de me perdre, je m’éparpille ; mon ka, mon bâ, mon shout et mon ren se dissocient les uns des autres. Je vois mon bâ déployer ses ailes au-dessus de ma dépouille et je peux me regarder par mes propres yeux. J’ai le vertige. J’agite les ailes du corps d’oiseau de mon bâ et détourne les yeux de ma propre tête juchée sur ce déroutant volatile. Mon ka, ma conscience et toute ma vie déroulée derrière moi contemple cet oiseau avec intérêt depuis l’Autre Monde. Bientôt, je le rejoindrai. Mon shout ou mon ombre, reste solidaire de mon cadavre. Et mon ren, mon nom « Ptah », flotte, immuable, tel un principe absolu tissant les liens qui unissent tout mes constituants. Si mon corps venait à disparaître à force de décomposition, tout le reste disparaîtrait avec lui. Je ne peux pas le permettre.

   J’ai envie de crier dans la maison, d’alerter mes enfants qui vivent encore sous mon toit. Foutu réflexe de vivant. J’ai beau m’être préparé du mieux que j’ai pu, je ne saisi pas encore tout ce que la mort implique. Déjà, mes organes commencent à se déliter. Je ne veux pas y penser. Il faut que mon corps soit transmis aux embaumeurs au plus vite sans quoi, je suis perdu. Mon bâ peut s’éloigner un peu, mais pas loin, pas encore. En trois coups d’ailes, je sors de la chambre à la recherche de Touéris, ma petite-fille qui est toujours la première debout. Mes ailes sont de plus en plus lourdes à mesure que je m’éloigne de mon corps.

   J’ai présumé des forces de mon bâ, je ne peux pas aller plus loin sans risquer la rupture. Je ramène mon bâ vers moi et le pose à mes pieds. Il faut que je cesse de faire n’importe quoi. Sans l’accomplissement des rituels d’embaumement, je ne pourrais pas commencer mon voyage. Mon dernier voyage vers moi-même et vers l’Au-Delà. Tenter quoi que ce soit maintenant serait synonyme de catastrophe pour mon intégrité. Je sens mon ka qui palpite, là-bas, de l’autre côté, il me tend les bras. Bientôt.

   Ma première épreuve dans la mort consiste à m’armer de patience et à attendre.

A suivre…

Catégories : Articles de Mantelia | Étiquettes : , , , , , , , , | 6 Commentaires

Champollion et les Hiéroglyphes Partie I

L’écriture des anciens Égyptiens a toujours fasciné l’humanité et la fascine encore aujourd’hui. La variété et la forme des signes hiéroglyphiques donneront lieu pendant longtemps aux tentatives d’interprétation les plus diverses, puisque, après la fermeture du dernier temple de l’Egypte Ancienne, au V°-VI° siècle de notre ère, toutes les connaissances sur la fonction de ces hiéroglyphes tomberont dans l’oubli. Quant aux tentatives ultérieures de déchiffrement, elles échoueront longtemps à la suite d’une erreur d’interprétation attribuant à chaque signe un sens uniquement sacré.

Jean-François Champollion

Le philosophe Grec Plotin (III° siècle) prétend ainsi que chaque hiéroglyphe représente une idée complexe, et le jésuite Athanase Kircher (1602-1680), qu’il s’agit de symboles « donnant un aperçu de […] grandes idées et de profonds mystères ». La situation change avec la découverte en 1799, près de Rosette, à l’est d’Alexandrie, d’une pierre gravée d’inscriptions (aujourd’hui conservée au British Museum, à Londres). Elle reproduit un décret sacerdotal de la neuvième année du règne de Ptolémée V Epiphane (196 av JC) dans trois versions différentes : hiéroglyphique, démotique (écriture égyptienne simplifiée) et grecque. Seul le texte grec pouvant être lu et compris, on essaie tout d’abord de repérer par des comparaisons les noms de lieux et de personnes dans les inscriptions démotiques et hiéroglyphiques. Un concours acharné pour le déchiffrement des hiéroglyphes s’établit alors entre l’Anglais Thomas Young, le Suédois David Akerblad et le Français Sylvestre de Sacy. Aucun des trois ne trouve la solution. C’est un autre Français, Jean-François Champollion (1790-1832), qui y parviendra.

La Pierre de Rosette

Fasciné depuis l’enfance par l’Egypte, le jeune Champollion commence dès l’âge de treize ans à étudier, outre le latin et le grec, plusieurs autres langues orientales, plus tard il apprendra également le copte, la dernière forme de l’ancien Egyptien. A dix-neuf ans, il est nommé Professeur adjoint d’histoire antique à Grenoble mais doit quitter ce poste peu de temps après pour des raisons politiques. En 1821, il rejoint à Paris son frère aîné , qui était alors secrétaire privé du philologue classique Bon Joseph Dacier. C’est là qu’il commence à se consacrer de manière intensive aux textes de la « Pierre de Rosette » et qu’il finit par la clé de déchiffrement de l’écriture hiéroglyphique après avoir compris qu’il s’agit d’une combinaison de phonogrammes et d’idéogrammes. Il décrit ses premières tentatives de déchiffrement et ses premiers succès dans sa lettre à Mr Dacier datant du 27 Septembre 1822. Champollion doit la découverte des premiers signes alphabétiques à l’écriture du nom du roi Ptolémée, mis en valeur dans le texte hiéroglyphique par l’ovale dont il est entouré, le cartouche. : en transférant la valeur sonore des lettres grecques aux hiéroglyphes, il parvient à comprendre la signification phonétique de ces derniers. Cependant, il n’est pas vraiment encore sûr de sa découverte.

A suivre.

Catégories : Archéologie Romancée, Articles Contributeurs, Articles de Mantelia | Étiquettes : , , , , , , , | 2 Commentaires

Créez un site Web ou un blog gratuitement sur WordPress.com.